C’est un musée étonnant que celui de la « Cohue » dont la partie la plus ancienne date du 13ème siècle. Un rez-de-chaussée roman (le passage entre la place Saint-Pierre et la rue des Halles accueille une expo de photos contemporaines très bien foutue), plein de salles, pleins de recoins, des niches, des gravures plus loin et de vieilles presses boursouflées de boulons, dentelées d’écrous, aux rouleaux qui sentiraient presque encore l’encre.
Puis la star nous accueille, Delacroix et sa crucifixion, panneaux alentours pour signaler un scandale académique. Objet du scandale : la Marie Madeleine, les seins prêts à dégoupiller de sa robe rouge ! Voilà, une autre époque. Me suis cognée ensuite sur toute une série de marines. J’aime pas les marines, cependant j’ai découvert Geneviève Asse. Que je ne classerais pas en fait parmi les peintres de marines. Elle peint des horizons, son bleu délimite un espace, celui du ciel, celui de la mer. Pour moi c'est net. Il n’y a rien de moins ambigu que la mer ou que le ciel, le liquide ou le gaz, il n’y a que notre regard qui vacille, la vue que l’on perd, les sens qui s’échappent, mais ni le sol ni même l’eau aussi fluide et vaporeux soient-ils, ne se posent en terme d’éléments ambigus. Oui nos sens sont fragiles, en équilibres, dupés par nos émotions, oui la signification s’égare, se modifie, sans cesse, mais ce qui n'a pas de conscience n’est pas fragile, il s’érode, on le saccage, il se transforme. Nous y transposons notre peur de la disparition de la lumière, ou l'émerveillement des apparitions lunaires. Les humains, les artistes ajoutent la magie et le trouble à la nature aussi bouillonnante qu'elle puisse paraître reste nette, précise dans son dessein : suivre les lois physiques.
Ce ne sont pas ses peintures de bleus et d’horizons
que j’ai le plus aimés, c’est le monumental diptyque blanc (pas 1 gramme de bleu
dans cette œuvre) du fond, du bout, qui m’a scotchée. Celui qui a
achevé ma visite un peu trop rapide. Achevée, cueillie, arrachée.
J’avais sans doute besoin de me poser un peu après tous ces étalages de
marées hautes et basses attachés à rendre plus vrai. Ma pause kit et
Kat, plantée devant une toile qui recouvre le temps et ses traces comme
autant de vieilles affiches superposées puis retirées ou des fantômes de
tableaux avec leurs marques jaunies ou grisées laissées sur le papier
peint. Deux toiles collées bord à bord, une simple étendue sans limite
simulée huilée de blanc. Et puis sur la partie gauche des souvenirs
subtils, des lézards de temps qui zèbrent l’écran. Les Langoliers de Stephen King qui
grignotent. Voici une toile souvenir d’aucune plage, une carte postale
vierge. Débarrassée de tout kitsch. Silencieuse sur plus de
quatre mètres, et humble. Je n’y ai pas lu de questions, pas de
naturalisme déloyal, une conséquence logique de cette exposition permanente, une boucle bouclée. Il n’y a pas de
mer ici. Pas même un ciel. Juste du temps érodé et l’empreinte humaine.Actualités du Musée
Photographies provenant du site des amis du musée de Vannes.

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